Modèles et statuts des modèles dans l'enseignement et la formation des enseignants
A. Marchive et B. Sarrazy - © 2008-2009 DCAM - Université V. Segalen Bordeaux 2

Modèles et statut des modèles

Le mythe de Pygmalion

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Le mythe de Pygmalion apparaît pour la première fois dans l'œuvre du poète Ovide (poète latin de l'époque d'Auguste : - 43 av. JC ; 17 après JC) les Métamorphoses (livre X). C'est un très beau récit qui pourrait se résumer ainsi : Pygmalion est un célibataire endurci et même un misogyne pris de dégoût devant le vice ordinaire des femmes ; il fabrique un objet d'art exceptionnel (une statue de femme en ivoire) ; il se prend de désir pour son œuvre ; la statue à l'apparence de la vie ; Pygmalion fait une offrande rituelle à Vénus et lui adresse une prière ; Vénus entend la prière ; Pygmalion revient à sa statue et son vœu est réalisé.

Voici un extrait des Métamorphoses (livre X) dans lequel Ovide fait le récit de cette légende

Témoin de leurs fureurs criminelles, et révolté des vices sans nombre qui dégradent le cœur des femmes, Pygmalion vivait libre, sans épouse, et longtemps sa couche demeura solitaire. Cependant son heureux ciseau, guidé par un art merveilleux, donne à l'ivoire éblouissant une forme que jamais femme ne reçut de la nature, et l'artiste s'éprend de son œuvre. Ce sont les traits d'une vierge, d'une mortelle (…). Ebloui, le cœur brûlant d'amour, Pygmalion s'enivre d'une flamme chimérique. Plus d'une fois il avance la main vers son idole, il la touche. Est-ce un corps, est-ce un ivoire ? (…) Il croit lui rendre baisers pour baisers ; tour à tour il lui parle il l'étreint ; il s'imagine que la chair cède à la pression de ses doigts ; il tremble qu'ils ne laissent leur empreinte sur les membres de la statue. Tantôt il la comble de caresses, tantôt il lui prodigue les dons chers aux jeunes filles (…) : tout lui sied, et nue, elle semble encore plus belle (…).

C'était la fête de Vénus. Chypre tout entière célébrait cette fameuse journée. (…) Pygmalion dépose son offrande sur l'autel, et debout, d'une voix timide : « Grands dieux, si tout vous est possible, donnez-moi une épouse... (il n'ose pas nommer la vierge d'ivoire) semblable à ma vierge d'ivoire ».

Vénus l'entend (…), comprend les vœux qu'il a formés ; et, présage heureux de sa protection divine, trois fois la flamme s'allume, trois fois un jet rapide s'élance dans les airs. Il revient, il vole à l'objet de sa flamme imaginaire, il se penche sur le lit, il couvre la statue de baisers. Dieux ! Ses lèvres sont tièdes ; il approche de nouveau la bouche. D'une main tremblante il interroge le cœur : l'ivoire ému s'attendrit, il a quitté sa dureté première, il fléchit sous les doigts, il cède. Telle la cire de l'Hymette s'amollit aux feux du jour, et, façonnée par le pouce de l'ouvrier, prend mille formes, se prête à mille usages divers. Pygmalion s'étonne ; il jouit timidement de son bonheur, il craint de se tromper ; sa main presse et presse encore celle qui réalise ses vœux. Elle existe. La veine s'enfle et repousse le doigt qui la cherche ; alors, seulement alors, l'artiste de Paphos, dans l'effusion de sa reconnaissance, répand tout son cœur aux pieds de Vénus. Enfin ce n'est plus sur une froide bouche que sa bouche s'imprime. La vierge sent les baisers qu'il lui donne ; elle les sent, car elle a rougi ; ses yeux timides s'ouvrent à la lumière, et d'abord elle voit le ciel et son amant.

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