Modèles et statuts des modèles dans l'enseignement et la formation des enseignants
A. Marchive et B. Sarrazy - © 2008-2009 DCAM - Université V. Segalen Bordeaux 2

Modèles et statut des modèles

La formation des maîtres : un enjeu pour la recherche

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Extrait de la note pour l’habilitation à diriger des recherches (p. 29-39)

Marchive A. (2006). - Approche anthropo-didactique des phénomènes d’enseignement et de formation : contribution à l’étude des rapports entre pédagogie et enseignement. Note pour l’habilitation à diriger des recherches, soutenue le 19 janvier 2006 à l’Université Victor Segalen Bordeaux 2.

Recherche et formation

Marchive A. « Qui sont les formateurs de mathématiques en France ? Recherche en didactique et formation des enseignants », Conférence invitée, Université Charles, Prague, 2004.

Comment les travaux de la recherche en didactique des mathématiques sont-ils reçus et diffusés par ceux-là mêmes qui sont chargés de la formation des futurs enseignants, les professeurs ou formateurs d’IUFM ? Cette recherche (à paraître) a été réalisée à partir d’une série d’entretiens « biographiques » menés auprès des formateurs de mathématiques d’un IUFM de l’Ouest de la France. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une recherche sur la formation, mais sur la manière dont ces formateurs ont pu, dans un premier temps, construire des savoirs et, dans un second temps, utiliser ces savoirs dans leur activité de formation. Comment expliquer qu’en dépit de la diversité des lieux et des outils de diffusion (séminaires, Ecoles d’été, revues), les travaux des didacticiens semblent relativement peu contribuer à la formation des enseignants et à la transformation des pratiques d’enseignement ? L’étude porte plus particulièrement sur les conditions de la réception et de la diffusion de la théorie des situations didactiques (Brousseau, 1998) qui, en articulant des apports théoriques de haut niveau et des recherches empiriques multiples sur les pratiques d’enseignement, pose de manière aiguë la question du statut et de l’usage des travaux de la recherche dans le champ de la formation.

On ne peut être enseignant, formateur, chercheur en sciences de l’éducation, et se désintéresser des rapports entre la recherche et la formation des enseignants. Certes la logique de la pratique n’est pas la logique de la recherche et celle-ci n’a pas à justifier de son utilité immédiate, pas plus qu’elle ne devrait exister qu’en réponse à des problèmes posés par la pratique. Le savoir de la pratique ne saurait d’ailleurs se réduire aux connaissances sur la pratique produites par la recherche, même si elles en sont un des aspects. La finalité de la recherche en éducation ne se limite donc pas aux liens qu’elle peut établir avec la formation mais, dès lors qu’elle se place sur le terrain scolaire et qu’elle se donne pour objet l’étude des situations d’enseignement (au sens large du terme), elle ne peut pas ne pas se préoccuper de la portée praxéologique des ses apports et de l’usage qui peut en être fait.

Dans l’éditorial ouvrant à un numéro de Recherche et Éducation consacré aux savoirs de la pratique, Chartier et Jacquet-Francillon soulignent le poids du modèle scolaire dans l’occultation des savoirs pratiques : « en faisant des savoirs livresques retenus par l’école, la pierre de touche des savoirs légitimes, il a occulté ou disqualifié tous les savoirs sociaux, non scolarisés ou mal scolarisables : les savoirs de la pratique » (1998, 7). Construits contre l’obscurantisme des savoirs traditionnels, les savoirs scolaires représentent les Lumières, la modernité, la victoire de Raison contre le dogme, de la science contre la croyance. Savoirs d’écriture matérialisés dans les ouvrages scientifiques puis scolaires, ils sont la nouvelle autorité, autrefois accordée aux saintes Ecritures[1]. Savoirs savants, œuvres littéraires ou textes philosophiques sont les savoirs fondamentaux sur lesquels repose la culture scolaire et qui seuls peuvent faire accéder à la « Culture » et former des esprits libres. L’avènement de la forme scolaire peut donc aussi se lire comme le point de départ de la lente disparition des formes de transmission populaire et de la dévalorisation des savoirs pratiques qui ne se transmettront plus qu’hors de l’école ou dans ses formes les plus méprisées : l’enseignement technique et professionnel.

Si la récente reconnaissance de l’existence de savoirs pratiques doit beaucoup aux mutations dans le monde du travail et de la formation professionnelle, elle doit sans doute encore davantage aux prises de conscience postcoloniales, aux luttes sociales et politiques (dont les revendications régionalistes), aux progrès techniques et aux évolutions sociales (médias, mais aussi migrations, voyages, etc.) et à la scolarisation de masse. N’oublions pas non plus, l’apport des anthropologues à la réflexion et à l’évolution de la conception de la notion de culture[2]. Le détour anthropologique, nécessaire à la reconnaissance des différents modes d’accès à la connaissance, contribue à renforcer l’idée que tous les savoirs ne sont pas produits dans la sphère académique : il existe aussi des savoirs qui se construisent dans la pratique et qui se transmettent à l’intérieur d’un milieu professionnel. Les travaux de cette nature sont relativement peu nombreux en France[3] et ne concernent pas l’institution scolaire, sans doute trop marquée par l’idéologie scientiste et le poids des savoirs institués. Il n’est pas dans mon intention de prôner un retour aux savoirs empiriques contre les savoirs scientifiques (ou prétendus tels), ni de valoriser les savoirs d’action contre les savoirs scolaires, mais de montrer en quoi le renversement de paradigme qui s’opère aujourd’hui peut contribuer à une redéfinition des rapports théorie - pratique dans le champ de la formation.

La formation des enseignants par la recherche est une idée relativement récente qui répond à une demande sociale de transformation des conditions de l’enseignement. Elle s’inscrit dans une stratégie d’innovation, d’élaboration de connaissances généralisables et s’appuie sur les mouvements pédagogiques de l’éducation nouvelle ou la psychosociologie. Elle se renforce avec la création d’une structure ministérielle de recherche (dont Louis Legrand sera nommé responsable en 1967), l’avènement des Sciences de l’éducation en 1967 et le développement de l’INRP qui passe de 10 chercheurs en 1967, à 120 en 1978 (Tournier, 1987) [4]. Deux grands courants semblent alors dominer : la démarche de recherche-action (Ferry et Blouet-Chapiro, 1984 ; Ferry, 1987) et la démarche scientifique classique (Huberman, 1978, 1987 ; Crahay, Lafontaine, 1986)[5]. Si la recherche-action a connu un relatif succès, c’est qu’elle ne se présentait pas en concurrence à la recherche « professionnelle » (i.e. menée par des chercheurs professionnels), et qu’elle ouvrait la voie de la recherche à tous, enseignants ou futurs enseignants, novices dans la recherche[6] : « A regarder la recherche comme une pratique, avec la démarche qu’elle effectue et l’attitude qu’elle implique, il apparaît que, sous une forme ou sous une autre, c’est une pratique manifestement accessible en tout lieu à quiconque décide de s’y engager » (Ferry, 1987, 29). Bien qu’il faille distinguer mener une recherche (ou participer à une recherche) et être en recherche, on comprend bien que la recherche est aussi un moyen de formation et qu’elle s’oppose aussi bien au « postulat techniciste selon lequel la maîtrise des pratiques pédagogiques s’obtient grâce à l’application des résultats de la recherche », qu’au « postulat expérimentaliste [qui] réduit la méthodologie de la recherche en éducation à la méthodologie des sciences de la nature » (id., 33). Son intérêt réside alors moins dans les résultats et leur utilité (ou leur utilisation éventuelle), que dans la démarche qu’elle implique en tant qu’outil de formation, dans le développement d’attitudes essentielles pour la conduite des actions éducatives et d’un état d’esprit fait de vigilance, d’attention, d’ouverture à l’inattendu et à l’impensé, etc.,

Bien qu’elle ait été défendue par des chercheurs confirmés (Barbier, 1977, 1996 ; Bru, 1984 ; Goyette, Lessard-Hebert, 1987), la recherche-action a aussi rencontré de sévères critiques, lui contestant sa validité scientifique autant que son utilité pratique. C’est ainsi qu’Huberman juge les recherches empiriques inopérantes, redondantes ou inadaptées et qu’il estime qu’il y a « moins besoin de nouvelles recherches confirmatoires que de recherches rigoureuses qui développent et accompagnent de nouvelles pratiques » (1987, 14). Il propose donc d’opérer une distinction entre formation et recherche et préconise une autre démarche que celle de la recherche-action, fondée sur une « démarche d’enquête systématique qui suit les canons classiques de la validité et de la fiabilité en sciences humaines » (id., 13)[7]. Au chercheur professionnel doit correspondre naturellement un enseignant professionnel, c’est-à-dire capable de maîtriser des savoirs théoriques de haut niveau et d’avoir une démarche non plus intuitive, mais rationnelle, non plus artisanale mais scientifique dont Bourdoncle marque fort opportunément les limites : « Sortir la formation des enseignants de son empirisme ancestral pour la faire tomber dans un théoricisme apraxique, sans lien avec la pratique, donnerait à coup sûr des résultats nettement plus catastrophiques pour les enfants en classe » (1991, 83).

Partant du même constat que l’activité scientifique et l’activité professionnelle sont deux systèmes autonomes, hermétiques l’un à l’autre, et de la difficulté à élaborer des modèles intégrateurs, Saint-Arnaud (1992), dans une critique très serrée, dénonce l’insuffisance des modèles de la science appliquée et de la recherche-action. Il propose un « nouveau discours de la méthode » où « l’activité professionnelle [est] conduite selon les critères classiques de la science traditionnelle » (id., 21). Ce système s’appuie sur le concept de « science-action » (Argyris et al., 1985 ; Shön, 1983) selon lequel la connaissance scientifique ne peut s’acquérir que par un changement scientifiquement contrôlé. Cette méthode se caractérise donc par le changement de la situation et par le contrôle scientifique de celui-ci : « d’une part les intentions professionnelles sont analysées dans le cadre d’une théorie de l’action que l’intervenant lui-même peut reconstituer à partir de l’observation systématique de son propre comportement ; d’autre part, la stratégie utilisée est construite et contrôlée scientifiquement à partir d’une réflexion dans l’action qui obéit aux règles fondamentales de l’activité scientifique » (Saint-Arnaud, 1992, 21). Ici le chercheur est un « consultant » visant à produire chez le praticien, une « réflexion dans l’action » faisant du « praticien réflexif » le principal chercheur. On mesure bien évidemment les limites d’un tel projet, qui assimile activité professionnelle et activité de recherche : ce n’est pas parce que le contrôle de l’activité est mené selon les critères de l’analyse scientifique que l’on a résolu la question des rapports entre recherche et formation.

Car une question de fond demeure, fort bien posée par Hébrard : « Entre les savoirs de la pratique, issus de l’expérience, non formalisés voire informels, donc intransmissibles, et les connaissances théoriques relevant des sciences humaines, transmises par l’enseignement, mais dont les applications, dans l’exercice d’une profession, à des situations complexes et diverses, n’est jamais évidente, est-il possible de construire dans les dispositifs de formation professionnelle qualifiante une pensée de la pratique qui soit à la fois fondée en théorie et utile au praticien ? » (1994, 23). Si la visée essentielle de la formation est le développement de la capacité à penser par soi-même sa pratique, cela signifie que les enseignants doivent modifier leur rapport aux objets de connaissance et ne plus se considérer comme de simples récepteurs, mais comme des acteurs, voire des producteurs de savoirs. Mais alors, qu’advient-il des savoirs de la recherche, ne sont-ils plus d’aucune utilité, où demeurent-ils une référence indispensable ? Et même si, comme l’affirme Hébrard, « visée de connaissance et “utilité” ou intérêt pour l’action ne s’opposent pas lorsqu’il s’agit de comprendre, d’analyser la pratique » (id., 29), le problème demeure de savoir comment opérer le transfert des résultats de la recherche vers la pratique. Tochon (1992) avait habilement mis en garde contre l’illusion d’un renversement de la perspective « descendante » ou déductive habituelle, en une perspective « ascendante » et inductive, où les enseignants, grâce à leurs connaissances pratiques, seraient seuls en charge de la transposition des savoirs savants, de leur adaptation dans le contexte de l’action en vue d’une « transformation pédagogique ». Mais la perspective médiane ouverte par Tochon, où « les savoirs de recherche doivent entrer en relation dialogique avec les connaissances de terrain » (id., 42), n’est guère convaincante, même s’il attribue aux formateurs de terrain un rôle fondamental de recontextualisation des savoirs théoriques en « connaissance praticienne ».

A partir du moment où l’on accorde une certaine validité et une certaine utilité aux travaux issus de la recherche en éducation, plusieurs questions se posent : où, sous quelle forme, à quelles conditions et dans quelles institutions, les savoirs issus de la recherche peuvent-ils percoler ? Que se passe-t-il quand des savoirs, des concepts, des théories, construits dans le champ scientifique, migrent dans le champ de la pratique ? Enfin, quand bien même les enseignants auraient-ils accès à ces savoirs, comment les recevraient-ils et comment se comporteraient-ils face au discours scientifique ?

La première question renvoie aux relations ambivalentes et parfois conflictuelles entre recherche et formation. Les travaux que j’ai engagés depuis 2000 auprès des formateurs d’IUFM[8] montrent que la valorisation et la diffusion des travaux de recherche sont loin d’être optimales et que la faiblesse de la politique éditoriale n’est pas seule en cause. On a souvent glosé sur le caractère abscons des productions scientifiques ou sur la distance entre les préoccupations des chercheurs et les questions posées par les enseignants. On a souligné le peu d’entrain des chercheurs à assurer la promotion et éventuellement la défense publique de leurs travaux. On a regretté le manque de lieux de rencontre et de débat autour des productions de la recherche ainsi que l’absence d’une politique de formation délibérément orientée vers la recherche et favorisant la rencontre avec les chercheurs. A toutes ces raisons conjoncturelles, il faudrait ajouter une raison structurelle plus profonde : la différence entre la situation du chercheur qui vit dans la skholè[9] et la situation d’enseignement qui, elle, ne peut suspendre les exigences de la situation et les urgences qu’elle impose. Ces deux mondes n’ont pas le même rapport à la contingence ; ils n’utilisent pas spontanément le même langage et ce serait une illusion de croire qu’un dialogue chercheur/enseignant pourrait s’établir « facilement » et « naturellement » : ce n’est pas parce que les objets sont les mêmes, que les manières d’appréhender ces objets, de les définir, de les décrire, de les comprendre, etc. sont aussi les mêmes.

La deuxième question a directement partie liée avec la précédente. On s’accorde aujourd’hui à penser que le passage des savoirs d’un monde à l’autre ne se fait pas par simple « transfert ». Etévé et Rayou (2002), en charge, au sein de l’INRP, d’une mission « Transfert et valorisation de la recherche » s’appuient sur des entretiens menés auprès de huit « personnalités » du monde de l’éducation et sur quelques rapports ou interventions, pour constater les difficultés des notions de « valorisation » et de « transfert ». Partant du constat que la sphère académique n’a pas le monopole de la création de savoirs et pour éviter l’image fâcheuse d’une relation descendante entre recherche et pratique, Derouet (2002, 14) préfère, quant à lui, parler de « circulation » et de « transformation » des savoirs. Pour rendre compte de ces transformations, Latour (1984) et Callon (1986) avancent la notion de « traduction »[10]. Malgré les précautions (entre autres, étymologiques) prises par les auteurs, la notion reste ambiguë et laisse planer l’idée d’une correspondance terme à terme. C’est pourquoi Derouet (2002), mais aussi Etévé et Rayou (2002) préfèrent la notion de « reproblématisation » proposée par Martinand (2000) : un savoir, parce qu’il est construit dans une sphère en fonction des enjeux de cette sphère, pour faire sens dans un nouveau contexte, doit être partiellement déconstruit et reconstruit en fonction des enjeux de ce nouveau contexte. Quand bien même le problème serait-il résolu au plan terminologique, la question reste entière de savoir sous quelle responsabilité et selon quel principe unificateur s’effectuera cette reproblématisation.

La troisième question ne traite pas des formes matérielles de la diffusion des savoirs scientifiques, ni de leur éventuelle transformation (traduction, contextualisation, reproblématisation) mais les conditions de réception du discours scientifique. Selon Feyerabend (1996), il a trois façons de réagir face au discours objectiviste de la science : la persistance (nos façons de procéder sont bonnes, à quoi bon changer ?), l’opportunisme (n’adopter ou n’adapter que les propositions qui nous semblent satisfaisantes), le relativisme (ce qui est utile, valide et vrai dans certaines conditions, ne l’est pas dans d’autres). La position de Feyerabend est connue : il opte, dans le champ des relations humaines, pour un « relativisme démocratique » selon lequel « les affaires importantes doivent être […] référées aux (perceptions et pensées des) personnes concernées et non à des instances abstraites ou à des spécialistes lointains » (id., 60). A cette position antiplatonicienne, où « les citoyens et non des groupes d’experts ont le dernier mot pour décider de ce qui est vrai ou faux, utile ou inutile pour leur société » (ibid., 72) on peut opposer que la science n’est pas démocratique, que le vrai et le faux ne se décident pas à la majorité.

Cette réserve faite, on peut avancer que dans le champ des sciences humaines la question de la réception du discours scientifique mérite intérêt pour au moins deux raisons : la relativité de la notion de vérité en raison de la nature des objets et la diversité des contextes étudiés d’une part ; la différence entre « constater un fait » ou « avancer une explication » et proposer des solutions ou formuler des prescriptions d’autre part. Certes il est bien de la responsabilité du chercheur de formuler des connaissances ayant un certain degré de validité, sinon de vérité (« toutes choses étant égales par ailleurs ») et il peut raisonnablement avancer certaines interprétations ou explications, voire proposer des cadres généraux d’intelligibilité (concepts, théories). Mais il ne peut pas aller plus loin et doit avancer, avec toutes les précautions nécessaires quant à la nature et à la portée de ses propos, des propositions pour l’action, à charge pour les acteurs de terrain, les enseignants, les formateurs, de décider ce qui est bon pour eux. On voit que la position de Feyerabend ainsi traduite - dont j’assume ma part d’interprétation, voire de détournement - n’est pas si scandaleuse, et que la question centrale est peut-être moins celle de la « circulation des savoirs » (quel que soit le nom qu’on lui donne) ou de la nature des forums à inventer, que celle de la place attribuée à chacun dans ces espaces. On voit aussi que c’est moins la recherche qui est en cause, que le type de rapport que le chercheur établit avec la communauté à qui il s’adresse ou que ses travaux concernent.

Une telle position ne nie pas la responsabilité du chercheur, elle lui assigne une place raisonnable : celle de participer, en tant que spécialiste d’un champ particulier, aux questions qui concernent ce champ, non pour s’ériger en juge ou en donneur de leçon, mais pour fournir des éléments pouvant permettre, sinon d’ouvrir un débat, du moins de prendre des décisions éclairées. Assumer cette responsabilité, tout en reconnaissant l’autonomie de l’acteur dans sa pratique, serait la meilleure manière de reconnaître à celui-ci sa dignité et sa « professionnalité », au sens de la maîtrise de son art et de sa responsabilité dans l’exercice de sa fonction. Ce serait aussi réintroduire la valeur de la mètis, cette forme d’intelligence rusée, adaptée et efficace, déjà refoulée par les philosophes grecs et magnifiquement réhabilitée par Détienne et Vernant (1995). Comprenons bien : il ne s’agit pas ici de condamner à moindre frais la démarche scientifique au nom d’un retour à la toute puissance des opinions ou des « vérités » de sens commun, mais de refuser l’idéalisme platonicien et de la toute puissance de l’Idée (ou du concept, ou de la théorie, …). Car si enseignants et chercheurs ont le même souci de l’amélioration de l’enseignement, la tâche de chacun est différente : l’un doit faire preuve de sa maîtrise pratique des situations d’enseignement indépendamment de la connaissance des raisons ; l’autre tente d’en acquérir la maîtrise théorique en s’efforçant d’en comprendre les raisons. Les conclusions auxquelles aboutit le chercheur ne sont donc pas des vérités suprêmes auquel l’enseignant devrait s’assujettir, mais des données particulières à partir desquelles il peut penser, réorganiser sa pratique in situ. La question de savoir s’il faut ou non réduire cet écart est une fausse piste : il est irréductible parce que constitutif des deux types de pratiques différentes (la pratique de la pratique et la pratique de la théorie). Prendre acte de cette différence, c’est prendre conscience des risques de « l’épistémocentrisme scolastique », cette forme de la pensée savante, qui nous fait prendre le monde tel qu’on le pense pour le monde tel qu’il est, « la vision scolastique [faisant] l’économie d’une interrogation méthodique sur la différence entre le point de vue théorique et le point de vue pratique » (Bourdieu, 1997b, 68).

Au terme de cette réflexion sur les rapports de la recherche et de la formation, une question demeure : une fois franchis les obstacles, levées les incompréhensions, exprimés les points de vue ; une fois résolus les problèmes matériels, méthodologiques, épistémologiques, qu’est-ce qui peut bien justifier l’engagement de l’enseignant dans une démarche de changement ou de modification de sa pratique ? Dit autrement : qu’est-ce qui permet aux théories de s’imposer dans le champ de la pratique ? Chacun sait qu’il n’existe pas de lien direct entre le degré de validité d’une théorie et son usage et que son attrait réside parfois davantage dans sa facilité d’accès ou son degré de conformité au paradigme dominant que dans sa puissance explicatrice. Il faudrait reconnaître, comme le remarque Tochon, que « la validité de la preuve n’a peut-être rien à voir avec le succès d’une théorie en sciences humaines. Quelle que soit la démonstration, l’important serait d’y croire » (1992, 46). Mais si les acteurs ne sont pas des individus rationnels (Elster, 1986), si les raisons qu’un enseignant a de s’engager dans une théorie n’ont rien à voir avec la raison, où réside alors le « pouvoir de la théorie » pour la pratique ? Ne risque-t-on pas de voir privilégiées les théories les plus accessibles, celles qui ont le mieux su se mettre en scène, qui confortent ou rassurent le plus les enseignants dans leurs pratiques ? Rappelons seulement pour mémoire la fameuse expérience sur « l’âge du capitaine »[11] menée par une équipe de Grenoble et l’exploitation qui en fut faite ensuite par Baruk (1985), alors que le « contrat didactique » pouvait déjà fournir un cadre explicatif des réponses des élèves[12]… mais ce n’était sans doute ni la voie la plus simple, ni la plus spectaculaire. Qu’on me comprenne bien : il ne s’agit pas de tenir des propos dogmatiques ou moralistes, mais de poser au contraire les limites de la rationalité des acteurs, quels qu’ils soient, comme le nœud gordien du rapport entre recherche et formation, que nous tentons sans cesse de dénouer…

Synthèses et modélisations

Marchive A. « Les interactions maître-élèves. Analyse critique et approche anthropo-didactique », 3e Colloque international "Recherche(s) et formation des enseignants", IUFM Aix-Marseille, 2000.

Les interactions maître-élèves constituent un objet de recherche clairement identifié, dès les années 70, dans le champ de la recherche pédagogique en France. Une analyse de contenu des publications françaises les plus importantes sur la période 1970-1999 montre que la centration sur les interactions maître-élèves s'accompagne rarement d'une réelle prise en compte des savoirs en jeu : soit les situations d'enseignement sont réduites à des situations de communication soit l'analyse des actes pédagogiques se limite à la centration sur les caractéristiques de l'enseignant soit l'ambition "holiste" conduit à une dilution des phénomènes étudiés. Une étude empirique des interactions verbales dans différents contextes d’enseignement des mathématiques à l'école élémentaire, menée par B. Sarrazy, constitue la deuxième partie de cette recherche.

Marchive A. « La modélisation dans la formation des enseignants. De la leçon modèle au modèle de la leçon », Recherche et Formation, 2003.

Ce texte propose une réflexion sur l’évolution du statut du modèle dans la formation des enseignants. Une première clarification conceptuelle permet de distinguer deux types de modèles, le premier fondé sur la reproduction et le second sur la formalisation, correspondant à deux types de vérité (omoiosis et alethéia). L’analyse de l’évolution du statut du modèle en formation montre que ces deux figures du modèle (« empirique » et « théorique ») se retrouvent dans l’activité même de modélisation des phénomènes d’enseignement. L’évocation des conditions de réception et d’utilisation des modèles par les enseignants conduit à interroger les enjeux praxéologiques et épistémologiques de ce type d’activité modélisatrice.

Les travaux que j’ai menés n’ont certes pas tous une utilité directe pour l’exercice de la pratique enseignante mais la plupart d’entre eux soulèvent, dans des contextes spécifiques et selon des rapports à la pratique différents, la question de la formation des enseignants. Je ne parlerai pas ici des recherches fondées sur l’observation ethnographique des classes (elles ont été évoquées dans le point précédent), ni des recherches « historico-philosophiques » à vocation réflexive (elles seront traitées dans le point suivant), mais de deux contributions de nature particulière pouvant être utilisées à des fins de formation et présentées à ce titre dans le cadre d’un colloque IUFM pour la première (Marchive, Sarrazy, 2000)[13] et de la revue Recherche et Formation pour la seconde (Marchive, 2003b).

L’étude des interactions pédagogiques ayant déjà été évoquée, je traiterai de l’exercice particulier de la revue de travaux et de son intérêt pour la formation. Un tel travail, pour être entrepris, suppose au moins deux conditions : d’abord une maîtrise de l’objet, c’est-à-dire non pas seulement une connaissance complète des travaux qu’il a suscités, mais aussi une connaissance empirique, en tant qu’objet d’étude, sans laquelle il se réduirait à une savante abstraction ; ensuite, un point de vue, un « angle d’attaque » particulier qui n’en fait pas un simple exercice de style, mais un outil au service d’une démonstration. Dans le cas qui nous occupe ici, une revue historique des travaux sur les interactions dans la classe depuis les années 70, il s’agissait de montrer l’évolution du traitement de l’objet et de rechercher quelle place la didactique pouvait occuper dans sa redéfinition et le renouvellement son étude. L’étude quantitative et l’analyse critique des contributions les plus significatives n’est donc pas seulement illustrative. Elle participe d’un projet plus global d’introduction d’une approche didactique des interactions dans la classe illustrée, dans la deuxième partie, par une recherche empirique sur les interactions maître-élèves dans l’enseignement des mathématiques à l’école élémentaire. L’enjeu est donc moins de proposer une synthèse érudite sur la question (le choix de se limiter aux principales revues françaises en est la preuve), que d’engager un travail de réflexion théorique pour renouveler le point de vue sur la question.

L’analyse de contenu des publications françaises les plus importantes[14] au cours de la période 1970-1999 permet d’avoir une vision relativement précise de l’évolution des recherches sur les interactions maître-élèves. Elle ne présente pas seulement un intérêt historique, montrant comment on est passé de l’étude des relations interindividuelles dans la classe (relations sociales au sein des petits groupes et relation pédagogique entre maître et élèves) à l'analyse des processus d'enseignement puis à l'émergence des didactiques des disciplines ; elle permet d’identifier les arrière-plans théoriques et l’évolution des différents paradigmes (fonctionnaliste, cognitiviste, interactionniste) dans lesquels s’inscrivent ces travaux et fournit les bases d’une analyse critique des travaux publiés dans ces revues par trois chercheurs importants (Bayer, Postic, Altet). L’objectif est d’ouvrir de nouvelles pistes pour l’étude des interactions maître-élèves prenant en compte, aussi bien les situations d’enseignement et les savoirs en jeu que les conditions d’arrière-plan, afin de contribuer au renouvellement des études sur les interactions maître-élèves.

Les notes de synthèse constituent des outils précieux, pour les chercheurs (qu’ils soient plus ou moins familiers du champ) et les formateurs[15]. Elles fournissent une base de données précises et clairement identifiées pouvant être utilisées aussi bien par les étudiants à des fins de formation professionnelle (en particulier dans le cadre des travaux personnels, le mémoire professionnel par exemple) que par les formateurs à des fins d’enseignement. Dans les entretiens que j’ai menés auprès des formateurs de mathématiques en IUFM ceux-ci soulignent les difficultés qu’ils rencontrent dans la mise à jour de leurs connaissances, principalement en raison de l’augmentation de leur charge de travail. Au moment où la production scientifique, dans le champ de l’éducation comme ailleurs, connaît un accroissement considérable, les travaux de synthèse permettent un accès rapide aux diverses sources de publications. Mais leur intérêt ne vaut pas seulement comme source bibliographique au service la formation personnelle où de la « remise à niveau » des connaissances, il réside aussi dans le point de vue théorique qu’ils privilégient et dans l’analyse qu’ils proposent des travaux analysés[16].

Je prendrai comme exemple, dans le champ didactique, la note de synthèse publiée par Sarrazy (1995) sur le contrat didactique. On sait la complexité de ce concept et la difficulté à avoir accès à certains textes fondateurs de Brousseau sur cette question. Le travail à la fois historique et analytique proposé par Sarrazy est un outil de référence pour qui veut découvrir les origines du contrat, le sens (et donc les usages) de celui-ci et son inscription dans son « biotope » théorique : la théorie des situations didactiques. Deux autres exemples me semblent devoir particulièrement bien illustrer l’intérêt de ces travaux de synthèse : les contributions de Forquin (1983), Derouet (1987), Henriot (1987), Sirota (1987) et Coulon (1988) parues dans la Revue Française de Pédagogie, qui ont ouvert de nouvelles perspectives de recherche en sociologie de l’éducation et probablement contribué au renouvellement méthodologique des années 90 (en particulier le développement de l’ethnographie de la classe) ; les synthèses de Bourdoncle (1991, 1993), sur la formation des enseignants et les numéros thématiques de la revue Recherche et Formation, qui constituent des sources incontournables pour qui veut s’engager dans ce champ. Inutile de dire que ces deux exemples ne sont pas cités par hasard : le premier a constitué un des points de départ de l’orientation dans ma carrière de chercheur ; le second a constitué un appui important pour mes travaux sur la formation des enseignants.

L’article intitulé « La modélisation dans la formation des enseignants. De la leçon modèle au modèle de la leçon » (Marchive, 2003b) est une tentative de réflexion sur l’évolution du statut du modèle dans la formation des enseignants. Ce type d’écrit, très différent des recherches empiriques, répond à la nécessité d’engager la réflexion sur l’évolution historique et théorique de la formation dans le champ scolaire. La visée n’est pas seulement descriptive et réflexive, elle est heuristique et pragmatique, puisqu’il s’agit, en proposant un essai de modélisation, de contribuer à cette évolution. L’idée défendue dans ce texte est la suivante : deux types de modèles sont à distinguer dans la formation des enseignants : un modèle « empirique » fondé sur l’imitation (mimésis) et qui correspond à un type de vérité omoiosis, adéquation entre le modèle observé et l’action réalisée ; un modèle « théorique », fondé sur la formalisation correspondant à un type de vérité alethéia, dans laquelle le modèle révèle, dévoile ce qui était obscur et le fait apparaître « dans la clarté d’une luminosité » (Heidegger, 1968, 17)[17]. L’évolution du statut du modèle en formation des enseignants montre que ces deux conceptions se sont succédées dans l’histoire de formation des enseignants. Une telle proposition ne saurait pour autant conduire à déclarer l’inégale dignité des modèles (ou la supériorité de l’un sur l’autre), en adoptant une posture prescriptive qui confondrait connaissance de l’action et connaissance pour l’action.

Si l’on examine la manière dont Brousseau a construit la théorie des situations didactiques, on se rend compte qu’un modèle théorique peut être autre chose qu’une stricte construction mentale sans lien avec la contingence : fondé sur l’observation des situations d’enseignement, il a quelque chance d’en fournir un modèle plus adéquat et donc plus utile pour la compréhension des phénomènes d’enseignement. Cela ne dispense pas de s’interroger sur les conditions de réception et d’utilisation de ces modèles par les enseignants eux-mêmes, et sur les enjeux praxéologiques et épistémologiques de ces modélisations : à l’heure où se développe la figure de l’enseignant « expert » (Bourdoncle, 1990 ; Tochon, 1993) et « professionnel » (Bourdoncle, 1991, 1993), le modèle ne risque-t-il pas de devenir un objet d’enseignement et se substituer ainsi à la chose même qu’il représente ?

Voilà qui nous ramène à la question initiale des rapports recherche / formation et de la place des savoirs produits de la recherche en formation. En sous-titrant sa seconde note de synthèse sur la professionnalisation des enseignants, « Les limites d’un mythe », Bourdoncle (1993) soulignait la résistance des enseignants aux modélisations théoriques « savantes » car, « bien que ces savoirs portent sur leur pratique et souvent la prescrivent, ils leur restent largement extérieurs » (id., 106). Dès lors on peut se demander si la défense de l’expérience et la résistance à la modélisation (et plus largement à toute forme de théorisation des pratiques), ne sont pas, pour les enseignants, un des moyens de se prémunir contre toute forme d’assujettissement de la pratique à des savoirs prescrits qu’ils n’ont pas produits et qu’ils ne contrôlent pas.

Bibliographie


[1] Pour une histoire de l’autorité discursive et des régimes d’énonciation de la Vérité à partir des « grands textes » (textes religieux, doctrines philosophiques, grandes idéologies), voir Leclerc (1996).

[2] Les références sont ici trop nombreuses : il faudrait citer tous les anthropologues, depuis la définition princeps de Tylor, en passant par Boas, Malinowski, le courant culturaliste (Mead, Benedict, etc.). Pour une rapide introduction, voir Cuche (1996), Beneton (1975).

[3]Après l’ouvrage fondateur de Delbos et Jorion (1990 [1984]), on trouvera quelques exemples de travaux portant sur les savoirs d’action dans Darré (1996) et Chevallier (1996).

[4] Il faudrait ajouter le réseau « Recherche et professionnalisation », réuni au CNAM en 1990-1991 à l’initiative de la DRED dans le cadre de l’Action de recherche en éducation, qui avait pour mission, à partir de son expérience propre, d’analyser la place et le rôle de la recherche dans le mouvement de professionnalisation de l’enseignement supérieur (Barbier, 1994).

[5] Pour une rapide présentation, voir Bourdoncle (1991).

[6] Mon mémoire de maîtrise de sciences de l’éducation, intitulé « Une approche empirique d’aide à l’apprentissage : le soutien scolaire en ZEP » et soutenu en 1988, qui étudiait les effets d’une expérimentation dans ma propre activité de soutien scolaire à des enfants de migrants, suivait une démarche proche de la recherche-action.

[7] Rappelons que l’ambition est déjà clairement fondée au début du siècle, de parvenir à un enseignement scientifique ou pour le moins un enseignement éclairé par la science (Claparède, 1916 ; Buyse, 1935 ; etc.). Voir les travaux de Charbonnel (1988), Gautherin (2002), Ottavi (2001, 2002) et infra, partie 2.

[8] Je fais ici référence à la contribution au colloque « Recherche(s) et formation des enseignants » organisé par l’IUFM de Marseille en février 2000 (Marchive, Sarrazy, 2000), à l’article paru dans Recherche et Formation (Marchive, 2003b) et à l’enquête par entretiens menée auprès de professeurs de mathématiques d’un IUFM de l’Ouest de la France, portant sur la réception et l’utilisation des travaux de la didactique dans les activités de formation (cf. supra, résumé p. 29).

[9] Bourdieu, qui a repris aux grecs l’usage de ce terme le définit comme « le temps libre et libéré des urgences du monde qui rend possible un rapport libre et libéré à ces urgences » (1997b, 9). En tant qu’elle met en suspens les exigences de la situation et libère des occupations et préoccupations pratiques, la skholè serait la condition d’existence de tous les champs savants. Elle est « ce qui rend possible ce regard indifférent au contexte et aux fins pratiques, ce rapport distant et distinctif aux mots et aux choses » (id., 25). Mais comme toute posture scolastique, la posture du chercheur porte une ambiguïté fondamentale : celle de d’instaurer une coupure, nécessaire mais potentiellement mutilante, avec le monde qu’il étudie.

[10] Dans un article intitulé « Diffusion des savoirs et textualité », Rey (2002) prend l’exemple de l’utilisation de la notion de conflit socio-cognitif dans la pratique enseignante pour montrer le rôle décisif de la mise en texte du savoir issu de la recherche dans les opérations de « transformation » ou de « traduction » qu’il subit. On pourrait utiliser, dans le même esprit, le concept de transduction (Atlan, 1979) dont il a été question plus haut (cf. supra, p. 14).

[11] En 1979 une équipe de l’IREM de Grenoble propose à des élèves de CE2-CM2 le problème suivant : « Sur un bateau il y a 26 moutons et 10 chèvres. Quel est l’âge du capitaine ? ». Sur 97 élèves, 76 calculent l’âge du capitaine. Baruk (1985, 24) dénonce « l’ampleur du sinistre », l’absence de sens des énoncés mathématiques pour les élèves, l’aveuglement et la surdité qui conduisent à de tels phénomènes, etc.

[12] Cf. le courrier que Brousseau adressa sur ce sujet aux chercheurs de l’IREM de Grenoble le 7 janvier 1980 (extraits in Sarrazy, 2002a, 16).

[13] Il s’agit d’une revue de travaux portant sur les interactions dans la classe, première partie d’une contribution commune avec B. Sarrazy intitulée : « Les interactions maître-élèves. Analyse critique et approche anthropo-didactique ». La première partie : « Les interactions maître-élèves dans les revues pédagogiques de langue française (1970-1999) : analyse critique », a fait l’objet d’un article proposé à la revue Educations. Il n’a malheureusement jamais été publié, la revue ayant prématurément cessé de paraître. Cet article n’a ensuite jamais été reproposé à publication. Une version résumée est accessible sur le site de l’IUFM d’Aix-Marseille : http://recherche.aix-mrs.iufm.fr/coll/mrs2000/

[14] Il s’agit des revues suivantes : Revue Française de Pédagogie (RFP), Sciences de l'Education. Pour l'Ere Nouvelle (SCE), Revue Française de Sociologie (RFS), Bulletin de Psychologie (BP), Psychologie Scolaire (PS) et Psychologie et Education. Quarante deux articles, dont les contenus sont entièrement ou partiellement liés aux interactions maître-élèves ont été retenus.

[15] A l’issue de la parution de mon texte sur le site cité dans la note précédente, j‘ai reçu plusieurs demandes de précisions théoriques ou de compléments bibliographiques émanant de formateurs d’IUFM (Marseille, Bordeaux, Toulouse), me faisant part de l’intérêt de ce travail pour leur activité de formation.

[16] Au cours d’un symposium du Congrès international d’Actualité de la recherche en éducation et formation, organisé par l’AECSE, consacré au rôle des travaux de synthèse dans le développement de la recherche en éducation, Jean-Claude Forquin a présenté, le 4 septembre 2004, une très intéressante contribution sur le sujet. Cette contribution, publiée dans Perspectives documentaires en éducation, situe le travail de synthèse entre projet encyclopédique, projet didactique et projet scientifique et s’interroge sur sa place dans l’espace des ressources documentaires (Forquin, 2003). Dans le même symposium, Régine Sirota s’interrogeait sur le statut de la note de synthèse : « Genre domestique ou maître du jeu ? ».

[17] Dans son étude sur le mythe de la caverne, Heidegger montre que l’essence de la vérité, fondée sur le non-voilement (άλήθεια) laisse la place à l’exactitude du regard (όρθότής). Une nouvelle forme de vérité apparaît, la vérité omoiosis(όμοίωσις), qu’Heidegger définit comme l’accord de la connaissance et de la chose elle-même. La vérité coïncide alors avec l’essence de l’Idée : « Le jugement est dit vrai pour autant qu’il se conforme à la chose elle-même, qu’il est une όμοίωσις » (1968, 155).

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