Reconnaître et analyser les subordonnées infinitives
Nous avons recopié ici le texte de René Depestre.
Les jours fériés, aux heures les plus torrides de l'après-midi, j'emmenais mon chagrin prendre le frais au balcon de la maison de bois. Je guettais l'incident qui mettrait mon imagination sur quelque piste du surréalisme quotidien. Un dimanche d'octobre, sur le tantôt, une voiture attira soudain mon attention. Elle commençait à longer lentement notre rue. De loin, je pouvais distinguer deux personnes à son bord.
– Que vois-tu arriver ? Dit Mam Diani.
– Une auto décapotée.
– La machine de qui ?
– Je l'aperçois pour la première fois.
– Ah oui ! Et les passagers ?
– Une dame et son chauffeur.
– Une dame en promenade par cette chaleur ?
– ...
L'auto se rapprochait dans un vrombissement raffiné. Déjà sur les vérandas et aux fenêtres, des deux côtés de la chaussée, comme nous deux ma mère, les voisins étaient aux nouvelles.
– Un cabriolet, une berline, un coupé ? dit ma mère.
– Une limousine, gris perle, flambant neuve !
– Et la dame, jésus-marie-joseph, qui est-ce ?
– Ma marraine, Madame Villaret-Joyeuse. Ti-Jérôme est au volant.
– Paix à ta bouche, Patrick ! Germaine Muzac est sur son lit de mort !
L'automobile de rêve était sous mes yeux. Ti-Jérôme Villaret-Joyeuse portait une chemise de tussor beige, un pantalon bleu marine et un chapeau de paille de Panama. Son visage de gai luron de la Caraïbe avait pris le masque tragique d'un nègre qui remplit un redoutable devoir. Sa maman occupait le milieu du siège arrière. Elle avait un grand éventail de Chine à une main, un mouchoir de baptiste à l'autre. Elle avait revêtu une robe mauve à collerette de dentelle, fermée par une broche en argent. Les manches lui arrivaient au coude avec des volants d'organdi. À son cou une chaîne en or soutenait un crucifix en ivoire. Ses boucles d'oreille et ses bracelets étincelaient. Elle était nu-tête et coiffée avec soin. Elle avait les lèvres, le nez, les joues d'un être bien portant. Mais les sourcils, qu'elle avait toujours eu arqués et très garnis, avaient exagérément poussé vers le haut du front et tout autour des yeux. Ils formaient un paon-de-nuit dont on distinguait nettement les antennes, la trompe, les ailes de papillon aux délicates écailles argentées. C'était une sorte de loup de carnaval, un demi-masque de velours ou de satin. À quel bal masqué pouvait se rendre ma marraine sous la canicule implacable de trois heures de l'après-midi ?
Question
Le texte ci-dessus contient deux propositions subordonnées infinitives ; relevez-les et analysez-les en faisant toutes les remarques nécessaires.
Solution
Les jours fériés, aux heures les plus torrides de l'après-midi, j'emmenais mon chagrin prendre le frais au balcon de la maison de bois. Je guettais l'incident qui mettrait mon imagination sur quelque piste du surréalisme quotidien. Un dimanche d'octobre, sur le tantôt, une voiture attira soudain mon attention. Elle commençait à longer lentement notre rue. De loin, je pouvais distinguer deux personnes à son bord.
– Que vois-tu arriver ? Dit Mam Diani.
– Une auto décapotée.
– La machine de qui ?
– Je l'aperçois pour la première fois.
– Ah oui ! Et les passagers ?
– Une dame et son chauffeur.
– Une dame en promenade par cette chaleur ?
– ...
L'auto se rapprochait dans un vrombissement raffiné. Déjà sur les vérandas et aux fenêtres, des deux côtés de la chaussée, comme nous deux ma mère, les voisins étaient aux nouvelles.
– Un cabriolet, une berline, un coupé ? dit ma mère.
– Une limousine, gris perle, flambant neuve !
– Et la dame, jésus-marie-joseph, qui est-ce ?
– Ma marraine, Madame Villaret-Joyeuse. Ti-Jérôme est au volant.
– Paix à ta bouche, Patrick ! Germaine Muzac est sur son lit de mort !
L'automobile de rêve était sous mes yeux. Ti-Jérôme Villaret-Joyeuse portait une chemise de tussor beige, un pantalon bleu marine et un chapeau de paille de Panama. Son visage de gai luron de la Caraïbe avait pris le masque tragique d'un nègre qui remplit un redoutable devoir. Sa maman occupait le milieu du siège arrière. Elle avait un grand éventail de Chine à une main, un mouchoir de baptiste à l'autre. Elle avait revêtu une robe mauve à collerette de dentelle, fermée par une broche en argent. Les manches lui arrivaient au coude avec des volants d'organdi. À son cou une chaîne en or soutenait un crucifix en ivoire. Ses boucles d'oreille et ses bracelets étincelaient. Elle était nu-tête et coiffée avec soin. Elle avait les lèvres, le nez, les joues d'un être bien portant. Mais les sourcils, qu'elle avait toujours eu arqués et très garnis, avaient exagérément poussé vers le haut du front et tout autour des yeux. Ils formaient un paon-de-nuit dont on distinguait nettement les antennes, la trompe, les ailes de papillon aux délicates écailles argentées. C'était une sorte de loup de carnaval, un demi-masque de velours ou de satin. À quel bal masqué pouvait se rendre ma marraine sous la canicule implacable de trois heures de l'après-midi ?
"mon chagrin prendre le frais au balcon de la maison de bois" : subordonnée infinitive, dont le sujet est "mon chagrin" et le verbe à l'infinitif "prendre" ; complément d'objet direct du verbe causatif de mouvement, "j'emmenais".
"Que vois-tu arriver ?" : subordonnée infinitive, dont le sujet est le pronom interrogatif "que" et le verbe à l'infinitif "arriver" ; complément d'objet direct du verbe de perception "vois-tu".
"vois-tu" est ici la proposition principale.